04 Sep MARIAGES, MODE D’EMPLOI
L’été est, comme le printemps, la saison des mariages. Nous n’avons pas fait exception à la règle puisque j’ai marié mes deux filles en juin…
— Félicitations ! dit la Marquise.
— Puis la sympathique boulangère du coin de la rue en juillet, puis deux fois des vieux amis qui vivent en couple depuis une quarantaine d’années et qui ont déjà enfants et petits-enfants (quand nous étions jeune, beaucoup trouvaient chic de ne pas se marier : Brassens, etc.).
— Bravo ! mais quel rapport avec la rhétorique ?
— Eh bien, cela saute aux yeux : une noce est une occasion obligée de discours. Celui du père de la mariée est un classique. Heureusement, on a généralement le temps de s’y préparer. Si vous avez du mal, venez prendre des cours à Rhétorik’Art. En revanche, pas plus tard qu’avant-hier, lors du mariage de deux vieux copains, je me suis trouvé pris au dépourvu lorsque (à peine entrés dans la salle des noces) la mariée me demande, la bouche en cœur, de faire le speech d’ouverture des festivités. Là, maintenant, tout de suite ! Qu’est-ce que je vais bien pouvoir leur raconter ?
— Eh oui ! Je suis curieuse de savoir ce que vous leur avez raconté.
— Je vous donne la recette : vous montez sur une chaise et vous faites immédiatement appel aux grands auteurs. Je vous en fournis trois qui sont inusables. D’abord Platon qui, dans La République (et ailleurs), fait l’éloge appuyé de la pédérastie comme voie suprême de la sagesse. Vous pouvez donc le citer comme contre-exemple pour dérider les invités — ou comme autorité si vous mariez un couple homosexuel.
— Et les deux autres ?
— Restez dans la philosophie (pour un discours, c’est toujours bien venu) en citant Kierkegaard : « Mariez-vous, vous le regretterez, ne vous mariez pas, vous le regretterez aussi ! » Et enfin Molière, qui fait dire à Scapin : « Il vaut mieux encore être marié que mort ! » (Les Fourberies, acte I, scène 4).
— Très bien, mais ensuite ?
— Ensuite ? Vous dites quelque chose d’aimable sur les jeunes époux. Car la règle d’or est de faire court. D’ailleurs, si on vous a demandé de parler, c’est que vous les connaissez bien, donc cela ne devrait pas poser de difficultés insurmontables.
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